Le confinement et la langue dominante

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Dans un précédent billet de blog, je vous parlais de l’effet du confinement sur la langue minoritaire. Ici, je continue cette interrogation sur un autre aspect du bilinguisme : la dominance des langues. Le confinement a-t-il pu inverser la tendance?

Qu’est-ce que la langue dominante?

La langue dominante est la langue la plus “forte”, la langue dans laquelle le bilingue est le plus à l’aise, et/ou qu’il utilise le plus. Les bilingues n’ont pas forcément la même langue dominante toute leur vie. Les bilingues “de naissance” ont souvent pour langue dominante la langue de leurs parents les premières années. L’entrée à l’école est souvent le moment où la langue majoritaire prend le dessus. D’autres changements dans la vie peuvent avoir un effet sur la dominance. Est-ce le cas du confinement?

Renversement de situation

Indéniablement, le confinement a souvent eu un effet positif sur la langue minoritaire. Malgré cela, la langue majoritaire reste la langue dominante de la plupart des enfants. Pour quelques familles, une inversion s’est pourtant produite.

Ça a pu être le cas de familles dans lesquelles les deux parents parlent la langue minoritaire. Pour les enfants non scolarisés, la langue majoritaire s’est alors effacée du quotidien. Olivia, 2 ans, ne s’exprimait presque plus en français, langue majoritaire, à la fin du confinement. Un séjour au Portugal a permis de consolider ses acquis. Aujourd’hui, le français a repris une place, mais le portugais est toujours bien présent. Cette exposition prolongée à la langue minoritaire a permis un meilleur équilibre entre les langues.

C’est aussi le cas d’enfants qui ont pu séjourner longuement dans le pays d’origine de leur(s) parent(s). Après 3 mois de confinement, Marius, 4 ans, a passé 3 mois en France. Alors que le catalan était utilisé à 95% du temps, il refusait de le parler en rentrant. Aujourd’hui, il le parle de nouveau, mais continue de parler français avec sa maman.

L’inversion de la dominance s’est donc produite avec une très forte exposition à la langue minoritaire durant le confinement, couplé avec un séjour dans le pays d’origine. Elle est cependant temporaire.

Le continuum du bilinguisme

En l’absence de renversement de situation, cela veut-il dire qu’il n’y a eu aucun effet sur la dominance des langues?

En réalité, la dominance n’est pas aussi simple qu’une langue dominante et une langue non-dominante. Il s’agit d’un continuum. Aux extrêmes de ce continuum, on y trouve le monolinguisme dans chaque langue. Au milieu, un bilinguisme équilibré. Rares sont les bilingues qui ont un bilinguisme équilibré. Les bilingues se déplacent sur ce continuum toute leur vie, selon les événements. Ce confinement en est un exemple.

Les enfants de Marie ne parlaient que peu français avant le confinement. Ils insèrent a présent des mots de français dans leurs phrases en anglais. Ces emprunts sont généralement plutôt faits dans la langue dominante. Cela montre donc qu’il y a bel et bien eu du mouvement sur l’axe de la dominance.

Tout comme le confinement a eu un effet sur la langue minoritaire, il a eu un effet sur la dominance des langues. Cependant, le confinement seul n’a pas renversé totalement la tendance. Il a permis un déplacement sur le continuum du bilinguisme. Quels sont les événements qui ont eu un effet sur votre continuum?

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Aodrenn

Aodrenn

Orthophoniste de formation, j’ai travaillé avec une patientèle francophone sur New York pendant plusieurs années. Cette expérience m’a inspiré ce blog, notamment les articles spécifiques au bilinguisme. Actuellement maman à temps plein d’une petite fille d’un an, je suis temporairement sur Montréal, où je peux passer du temps à la bibliothèque pour dénicher de nombreux livres à vous suggérer dans mes chroniques.

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